Mazarinades (1648-1653) : la Fronde, les mots, les presses
Mazarinades (1648-1653) : la Fronde, les mots, les presses EN

II. Formes et genres alternatifs : manuscrits, placards et chansons

07. L'actualité en image : Le plan des deux armées campées proche de Ville-neufve Sainct George.

Le plan des deux armées campées proche de Ville-neufve Sainct George. A Paris, 1652. Placard. Gravure sur bois. In-folio. 

   Au temps de la Fronde on désignait l’affiche par le mot « placard », à rapprocher de l’équivalent resté en allemand contemporain, « Plakat ». Feuillets uniques imprimés ou gravés sur une seule face, ils étaient donc ordinairement placardés, de façon plus ou moins sauvage, de préférence en des lieux stratégiques de passage ou de rassemblement, près des églises, sur les places, près des ponts, là où se tenaient les marchés, utilisation en plein air qui n’a évidemment pas favorisé leur conservation en nombre. Selon les circonstances, les sujets traités, leur parution s’articulait en amont ou en complément des autres mazarinades et participait à une diffusion relayée oralement pour répondre à l’attente de tous les publics, lettrés ou non. Les placards frondeurs venaient ainsi concurrencer ce très officiel medium d’information et de communication des autorités en place, notamment le pouvoir royal et ses crieurs. On peut se demander si une partie d’entre eux n’a pas été diffusée plutôt comme des tracts, procédé qui peut avoir contribué à la sauvegarde d’exemplaires jusqu’à nos jours, part infime de la quantité considérable qui en a été assurément produite. Plus facilement que les mazarinades en libelles, les placards associèrent l’image au texte ou en firent même l’élément principal. La gravure sur bois, cinq à six fois moins chère à produire que la gravure sur métal à surface égale, était là aussi l’option technique privilégiée. Le plan est orienté le nord en bas. Le style du dessin rappelle les représentations réalisées à l’occasion d’opérations de bornage, ou les « figures » accompagnant les pièces d’une procédure lors d’un litige entre seigneurs propriétaires, ou encore l’illustration de documents de gestion domaniale : terriers, censiers, etc. La proximité des opérations militaires ne pouvait qu’exciter l’attente du public parisien, forcément inquiet quant à leur issue. D’après le journal de Dubuisson-Aubenay, les troupes royales tenaient la position, dénommée ici « Eminance » (un jeu de mot facile ?) – en réalité le mont Griffon – depuis le 10 septembre 1652. Le possesseur du document à l’époque indique, peut-être avec un certain mépris, que Turenne se libéra du relatif encerclement opéré par les trois corps d’armée rebelles (Condé, Lorraine, Wurtemberg) en levant le camp le 4 octobre suivant, de nuit et sans combattre...

Mazarine : M 10529
Exemplaire numérisé


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